4 avril 2009

Flambé d’activité des jeux de hasard illégaux dans les grandes villes du Kazakhstan

01.04.2009, Manchük Assautaï

Au Kazakhstan, depuis l’interdiction légale de toute activité de jeu hors des zones consacrées les casinos sont passés dans la clandestinité, et leurs activités sont fréquemment l’objet de découvertes dans les grandes villes. Néanmoins, il semble que l’emploi de la force par l’état ne suffira pas à éliminer complètement cette économie parallèle.
Après que la loi sur les activités de jeux de hasard ait été renforcée en 2007, les casinos des grandes villes, et les machines automatiques avaient cessé toute activité. Le texte de loi n’autorise l’organisation de jeux de hasard que dans deux zones spécifiques du pays: Khapcharaï et Burabaï.
Cependant en l’espace de quelques années l’industrie des jeux de hasard a tourné à une sorte d’économie parallèle. Le nombre de ceux qui en font profession ne diminue pas. Et depuis le début de cette année, le travail en collaboration du département des affaires internes et du ministère public de la ville d’Almaty a permis de mettre à jour l’activité clandestine de 12 casinos dans la ville, nous informe le représentant des affaires internes, le capitaine de police Saltanat Azirbek.
A l’en croire, si deux de ces casinos ont été découverts au cours des deux premiers mois de cette année, les autres n’ont pu être dépisté que dans les derniers jours. En général, vue de l’extérieur ces salles de jeux ressemblent simplement à des lieus de loisir où l’on passe le temps à de simples jeux, sans d’aucune manière y miser d’argent.
Les seuls individus au courant du fait, que s’y déroulent des activités illégales de jeux de hasard, sont les patrons des casinos clandestins, et les joueurs réguliers qui gravitent autour d’eux, nous expliquent les représentants de la loi. D’après ce qu’ils nous en disent, les patrons de l’économie parallèle savent tirer avantage des aspects laxistes de la loi, pour échapper à leur responsabilité pénale.
D’après l’article 190 du code pénal de la République du Kazakhstan, l’engagement de la responsabilité pénale du fait de l’exercice d’une activité illégale implique la confiscation sur les lieux d’investigation d’une somme d’argent au moins équivalente à 500 salaires numéraires. Si une telle somme n’est pas disponible, les propriétaires de salles de jeux ne voient leur responsabilité engagé que sur le plan administratif.
En vérité, pour les individus qui dégagent de cette économie parallèle des bénéfices atteignant des dizaines, des centaines de milliers, cela est insignifiant disent les professionnels. Cela étant, les professionnels du droit espèrent que les dernières modifications apportées à la loi sur les jeux de hasard puissent faire obstacle aux activités dissimulés des patrons des salles de jeu.
–« Jusqu’au premier janvier de cette année, la loi sur les activités de jeux de hasard comprenait de très nombreuses imperfection. Néanmoins, elles ont toutes été supprimées. A présent les propriétaires de ces salles de jeux ne verront leur responsabilité écartée que dans la limite des cas où leur activité n’aurait pour objectif ni l’offre de biens en numéraires, ni même sous tout autre forme»,- explique Saltanat Azirbek.
Ainsi, désormais dans les cas où de telles infractions à la loi seraient établies, les coupables encourraient selon le code pénal kazakh, article 190 premier alinéa : 2 ans de privation de liberté, alinéa 2 : 5 ans de privation de liberté.
Quelques Experts avancent l’opinion selon laquelle un compromis entre l’état et l’économie des jeux de hasard est indispensable pour la société. D’après l’opinion de Raxman Alchanov, docteur en sciences économiques, le plus important dans la loi est de permettre aux personnes esclaves des jeux de hasard d’échapper à la déchéance, et de protéger les droits des simples citoyens.
Au Kazakhstan, le bizness des jeux de hasard est seulement apparu au début des années 90. D’après des documents datant de 2007 le nombre de casinos au Kazakhstan était de 140 établissements, dont 37 installés dans la ville d’Almaty.

Azattyk radioci, "Тыйым салынған құмар ойындары үлкен қалаларда қызып тұр" (traduction du kazakh)

Le Kazakhstan dans sa hâte de parvenir au rang des 50 pays les plus avancés, en recul de deux places

31.03.2009, Talghat Düycenbek

Le Forum Economique Mondial (World Economic Forum) publie son classement pour les années 2008-2009 consacré au développement dans les principaux pays du globe des technologies et infrastructures de l’information. Parmi les 143 pays du classement le Kazakhstan arrive en 73e position.
Dans le classement du Rapport Global sur les Technologies de l’Information 2008-2009, le Kazakhstan est descendu de deux places par rapport aux années précédentes. Dans l’étude dont il est question le Kazakhstan occupe la 5e position parmi les états postsoviétiques. L’Estonie (18e position), la Lettonie (48e), la Lituanie (48e) et L’Azerbaïdjan (60e) occupent les quatre premières places.
Et, s’agissant des divers indicateurs concernant les pays classés après le Kazakhstan, ils sont les suivants : Russie 74e, Géorgie 88e, Moldavie 99e, Tadjikistan 104e, Arménie 114e, Kyrghyzstan 115e. Les pays en tête de la liste sont le Danemark, la Suède, les Etats Unis et Singapour. La Suisse, la Finlande, l’Irlande, la Norvège, les Pays Bas, et le Canada suivent immédiatement aux 10 premières places.
Ce classement fait l’objet d’une réactualisation annuel, et les enquêteurs du Forum Economique Mondial au cours de sa préparation s’appuient sur les critères suivant afin de recourir à la notation des états étudiés : l’implantation des innovations techniques, le degré de diffusion des technologies haut de gamme dans le secteur étatique et le monde des affaires, le niveau de développement des infrastructures systémiques, cela incluant la qualité et le nombre des services IT proposé par des acteurs privés et commerciaux.
D’après l’avis des spécialistes du FEM, le groupe de tête des états qui ont vu leurs précédents indicateurs s’améliorer comporte ceux qui sont arrivés à des résultats probants concernant les infrastructures systémiques, c'est à dire s’agissant des moyens de communication de demain. Par ailleurs, le rapport de l’organisation pointe le fait que de nombreux pays ont, en l’espace de deux ans, considérablement élevé la qualité et le niveau de leur éducation à travers l’implantation des technologies de l’information.
Pour le pouvoir kazakh le fait de s’éloigner d’année en année du groupe des 50 premiers états dans un classement international, est considéré comme un mauvais coup au plan stratégique de « rentrer dans la catégorie des 50 états les plus concurrentiels ». Les experts kazakhs sont également d’avis qu’il s’agit d’un revers à la stratégie visant à faire partie des 50 états les plus avancés.

  • UN CAPITALISME TRIVIAL FONDE SUR LA CORRUPTION
Tölegen Jukeev, premier secrétaire du parti « Azat », considère que si les habitudes actuelles du gouvernement perdure sans le moindre changement, le Kazakhstan ne fera pas parti des 50 états les plus compétitifs, mais pourrait bien se retrouver à très court terme recalé au rang des 100 derniers. D’après son avis, la république n’est actuellement pas au rang des 50 états les plus compétitifs, mais au contraire continue à se développer dans la voie de l’installation d’un état capitaliste trivial fondé sur la corruption.
– « plus les années passe plus nous nous éloignons du rang des 50 états les plus avancés. Pris sous un certain angle, cela pourrait être la conséquence de la crise économique. Cependant, les autres pays sont également sous le coup de la crise »,- explique T.Jukeev. – « En conséquence, la ligne de développement économique du Kazakhstan ne nous permet pas de rejoindre les états avancés. Nous devons tout changer. Il est nécessaire d’employer d’autres moyens pour redresser notre système économique. Et, pour radicalement modifier les fondements économiques, il est nécessaire de modifier les institutions politiques nationales. Le temps où l’autoritarisme pouvait devenir un avantage concurrentiel est révolu. Au jour présent, dans la nouvelle situation économique la probabilité pour des états autoritaristes d’entrer au nombre des états les plus concurrentiel est faible. Vu de cette manière, la probabilité pour le Kazakhstan apparaît comme nulle.
»
Alixan Baïmenov, président du parti « Ak Jol », rappelle que lorsqu’il s’agit de définir les aptitudes concurrentielles d’un pays l’examen du niveau de développement de ses infrastructures est très important. D’après lui, il est clair que les infrastructures actuelles de la république ne sont pas au niveau des 50 pays les plus avancés, cependant les autorités se trompent dans le chemin pour s’en rapprocher.
– « Les infrastructures, les routes, l’énergie, les communications, sont le fondement de la liberté d'entrer en contact avec de nouveaux partenaires. Le bizness se développe de lui-même dans un tel environnement, car il n’a pas à investire pour les infrastructures. Par exemple, au Kazakhstan le secteur des communications sans fil a cessé de se développer. Dans le nouveau programme de Barak Obama, il y a un volet consacré à la baisse des couts de l’internet. Pourtant si l’on compare avec notre république, il s'agit des Etats Unis où les prix des services de connections sont dix fois moins élevés. Et, bon qu’il faille réduire les coûts des communications, d’accord, mais il y a conflit d’intérêt dans la compagnie nationale « Kazakh-télécom », la moitié des actions sont entre les mains de l’état, le reste est propriété privée. Si l’une de ces parties est favorable à des communications bon marchés, la seconde a pour objectif d’augmenter ses bénéfices »,- explique A.Baïmenov.

  • UNE OMBRE DANS UNE PIECE OBSCURE
Quant au sénateur Ghani Kacymov, président du parti « les Patriotes », il considère que le fait même de rendre public un classement international en temps de crise globale revient exactement à poursuivre une ombre dans une pièce obscure.
– « Dans la situation actuelle, la question de la sortie de crise est la plus importante dans tous les pays. L’intérêt qu’il peut y avoir à discuter la question de savoir si vous êtes actuellement en 73e ou 48e position est très limité. Parce que, dans une époque instable comme celle-ci, tous les indicateurs fluctuent sans aucune logique. Pris sous cet aspect, les experts se gardent bien de faire des pronostiques. Bien, comment l’état va-t-il pouvoir sortir de cette crise ? C’est là, la question importante. C'est-à-dire, que diriez-vous si au sortir de la crise le Kazakhstan n’était plus en 73e position mais en 23e ? Donc, patientez encore un peu.
»
L’économiste Khanat Berentaev a fait es propres comptes s’agissant du niveau de développement du Kazakhstan. D’après lui, les experts du Forum Economique Mondial ont beaucoup trop favorablement noté le Kazakhstan :
– « Il me semble que pour le Kazakhstan la 73e place elle-même est très élevée. Cela ne fait en effet que 10 ans, que nous avons pris en main notre propre projet énergétique, les nanotechnologies. Et, le chef de l’état lui-même a récemment reconnu que tous cela restait encore sur le papier, que les autorités n’avaient rien mis en application. Cela montre que l’économie Kazakhstanaise n’est pas prête à maîtriser les nouvelles technologies. Par ailleurs, si nous prenons en considération les réformes en cours dans l’éducation, et plus particulièrement le système d’évaluation, celui-ci prive les étudiants de la faculté de réfléchir en profondeur, et aujourd’hui dans notre république le capital humain n’est pas d’ordre à maîtriser des technologies trop pointues ».
Avec cela, K.Berentaev considèrent que l’objectif affiché dans la stratégie de rattrapage des 50 pays les plus compétitifs n’est pas correcte.
–« Des objectifs comme celui d’entrer parmi les 50 premiers ou les 10 premiers sont habituellement d’usage dans le domaine sportif, mais, le fait de fixer une telle obligation à un état n’est en soit pas correcte. Nous ne pouvons fixer pour objectif économique que l’amélioration des conditions de vie de notre population. Ce n’est qu’en construisant une économie capable de résoudre de tels objectifs, que notre république pourra rejoindre le groupe des pays de niveau mondial.
»
3 ans ont désormais passé depuis que le président de la république N.Nazarbaev a proclamé la stratégie pour le Kazakhstan d’entrer parmi les 50 pays les plus compétitifs mondialement.

Radio Azattyk, "Үздік елу елдің қатарына ұмтылған Қазақстан тағы екі қадам артқа шегінді" (traduction du Kazakh)

3 avril 2009

A propos de Dolkhyn Kerimbakiev, citoyen Kazakhstanais, détenu 7 ans à Guantanamo

Dolkhyn retrouve sa famille,
mais aucune nouvelle de sa mère partie a sa recherche


07.11.2008, Ermek Boltaï


Le dernier prisonnier Kazakhstanais du camp de Guantanamo, Dolkhyn Kerimbakiev a été renvoyé à Astana le 3 novembre 2008. Le journaliste d’Azattyk s’est rendu jusqu’à son village, pour prendre connaissance de sa situation.
Au début de l’an 2000, quatre citoyens du Kazakhstan étudiants d’une mèdressé pakistanaise étaient fait prisonniers sur le territoire afghan par les soldats américains. L’un de ces prisonniers était Dolkhyn Kerimbakiev.
La presse Kazakstanaise n’a pas peu parlé au sujet de Dolkhyn Kerimbekov, Aïtu Abykhanov, Ilxomjon Botaev et Suxbat Arupov tous les quatre retenus dans la prison américaine de Guantanamo située sur le territoire nationale de Cuba. Les toutes premières nouvelles à voir le jour à propos de ces trois individus disparus sans laissé de trace datent d’il y a deux ans. Jusqu’à lors personne ne savait où ils se trouvaient, et leurs familles et proches considéraient déjà les quatre susnommés au rang des morts.
Aïtu Abykhanov n’est pas parvenu à oublier les mauvais traitements de Guantanamo.
Le 6 novembre, nous publions sur le site de radio Azattyk la nouvelle du retour au pays de Dolkhyn Kerimbakiev, citoyen Kazakhstanais, après 7ans passé en détention dans la prison de Guantanamo. Il ne fut pas facile au journaliste d’Azattyk de retrouver la famille de Kerimbakiev, originaire du village de Kyzyl Charyk à 120 kilomètres de distance d’Almaty.
Bien que Kyzyl Charyk aie tout d’un somme toute petit village, frapper à la porte des quelques 300 maisons pour retrouver la trace des citoyens Kazakhstanais détenus dans la prison américaine, ne s’annonçait pas une tâche facile. Pour cette raison, nous décidâmes de poser la question à toute personne rencontrée dans la rue : « Excusez-nous, où habitent les familles des anciens détenus de Guantanamo, Aïtu Abykhanov, Suxbat Arupov et Dolkhyn Kerimbekov ? »
Darkhan âgé de 6 ans, passant sur son âne et très occupé à mener un veau, qui nous indiqua la route. Il ajouta : « Aïtu agha, celui qui a été en prison avec Jean-Claude Van Damme, c’est bien ça ? C’est notre voisin, si vous me suivez, je vais vous amener comme cela vous ne pourrez pas vous perdre». Comme Darkhan nous l’avait dit, il nous amena jusque devant la maison d’Aïtu Abykhanov. Puis menant son veau de l’autre côté du portail, il nous prévînt : « Agha, faîtes attention, Aïtu il a pété un câble dans sa tête. Quand il devient fou, il est capable de cogner sur le premier venu ».
Lorsque nous entrèrent chez Aïtu, celui-ci était en plein préparatif de la lecture de Namaz. Nous lui demandâmes : « Aïtu, il paraît que Dolkhyn est arrivé il y a un jour, peux-tu nous indiquer sa maison ? ». Mais Aïtu, lui aussi prisonnier des américains, se lança dans une toute autre histoire. Il nous expliqua, que ces derniers jours sa grand-mère était tout juste revenue d’un voyage en Chine, et qu’il avait un peu mal à la tête. La conversation, que nous pûmes avoir avec Aïtu Abykhanov ne dura pas longtemps. Après un temps relativement court, « je reviens à l’instant » dit-il en rentrant dans sa maison pour finalement ne plus en ressortir.
Le frère ainé d’Aïtu nommé Oral nous ayant remarqué à l’entré s’approcha de nous, pour nous demander d’où nous venions. Alors que nous discutions avec lui de la situation actuelle d’Aïtu, une petite fille de 7, 8 ans sortît de la maison en courant et nous apprît qu’elle s’était enfuie en sautant par la fenêtre de la chambre de son oncle. Oral Abykhanov nous raconta que son petit frère Aïtu avait radicalement changé après la prison de Guantanamo et qu’il souffrait de maux de tête.
—« Mon frangin a contracté une maladie des nerf. Ça fait plus d’un an qu’il est revenu des USA, pourtant il n’est toujours pas revenu à lui. Alors ne vous vexez pas, mais pour aujourd’hui il ne pourra sûrement avoir de conversation avec personne »,- ajouta Oral.
Oral n’avait pas entendu dire, que Dolkhyn était de retour au Kazakhstan. Pourtant, il nous indiqua où se trouvait la maison de sa proche famille.
A la suite de l’opération de lutte contre le terrorisme lancée par les Etats-Unis sur le territoire Afghan, plus de 500 personnes sont restées détenues dans le centre de Guantanamo, parmi eux quatre citoyens du Kazakhstan.
Alors que nous frappions à la porte de Dolkhyn, sa sœur aînée nommée Elmira sortit à notre rencontre. Apprenant que nous étions des journalistes arrivés à grand peine d’Almaty, elle nous expliqua que Dolkhyn n’aurait pas la force de discuter avec des inconnus. Elle ajouta qu’en plus sa grand-mère était restée alitée bien malade.
— « Grand-mère attend Dolkhyn depuis 8 ans. C’est une personne âgée, elle a reçu un énorme choque en apprenant cette heureuse nouvelle. Hier dans la soirée sa pression artérielle a augmenté, elle a dû s’aliter, depuis bien qu’on ait appelé les ambulanciers à une ou deux reprises, elle n’a pas daigné se lever de sa place. Elle a les jambes glacées, et nous avons peur que sans prévenir elle ne rende son dernier souffle. Dolkhyn supporte très mal l’idée que sa grand-mère soit tombée souffrante et cela joue sur ses nerfs. Peut être, devriez vous revenir un autre jour »,- nous dit-elle.
Nous tentâmes de faire comprendre à Elmira que nous ne pouvions pas rentrée les mains vides à Almaty. Alors Elmira dit qu’elle essaierait de convaincre Dolkhyn de s’entretenir avec nous et rentra à l’intérieur. Nous sommes alors restés pas loin d’une heure à attendre des nouvelles de Dolkhyn. Mais n’ayant été libéré que depuis très récemment celui-ci refusa de nous donner un entretien.

  • Dolkhyn Kepimbakiev est terrifié par la lumière électrique
Nous nous adressâmes alors à la tante Nurxan, qui passait sans arrêt de la maison à la cour, pour lui demander s’il ne serait pas néanmoins possible de rencontrer Dolkhyn en personne, elle accepta après un court moment de réflexion.
Nurxan nous demanda néanmoins avant que nous ayons rencontré Dolkhyn, de ne pas le prendre en photo.
—« Bien que je reconnaisse le visage et l’allure de Dolkhyn, je n’ai pas du tout reconnu son monde intérieur, sa personnalité. En l’espace de huit ans, toute personne peut changer jusqu’à un certain point, bien sûr. Mais, mon Dolkhyn est revenu au pays totalement autre. Hier soir, nous avons bien essayé de discuter avec lui, il nous a prié de ne pas poser de questions à propos de la prison américaine de Guantanamo.
— « N’avez-vous pas aussi rencontré Aïtu Abykanov ? Il a lui aussi complètement changé »,- continua Nurxan. « Dans leur enfance ils étaient tous les deux des amis inséparable. A en croire ce que raconte les gens du village, Aïtu est devenu lunatique. Notre Dolkhyn aussi est devenu vraiment spécial. A présent, tout est comme si ils ne souhaitaient plus se revoir. De plus, Dolkhyn a peur de la lumière électrique. Quand le soleil se couche, il éteint toutes les lumières à l’intérieur et reste assis dans l’obscurité. Il raconte que pendant 7 ans les soldats américains n’éteignaient jamais la lumière dans la pièce où nous nous trouvions. La lumière électrique a provoqué chez lui des affections nerveuses. Voilà, quand vous le rencontrerez ne le prenez pas en photo. Il se mettrait à hurler et gênerait tout le monde. Il semble qu’on l’a vraiment fait beaucoup souffrir dans cette prison américaine »,- raconte Nurxan Sabirova.
Quand nous avons enfin pu voir Dolkhyn, il était assis sur une petite chaise dans le fond de la pièce et se parlait à lui-même. Comme il parlait à voix étouffé, nous ne pûmes comprendre ce qu’il disait. Dolkhyn ne se retourna même pas dans notre direction. Nous avons essayé d’entamer la conversation avec lui, mais il ne nous prêta pas attention. Il continuait à murmurer des paroles incompréhensibles sauf de lui-même dans une attitude de prostration. Comprenant que nous ne pourrions rien en tirer, nous sortîmes en le laissant seul dans la pièce.
Malgré que nous ne puissions obtenir un entretien avec Dolkyn Kerimbakiev, nous avons recueilli quelques informations de la part de ses proches. D’après Elmira Kerimbakieva, personne n’est à blâmer pour l’état dans lequel se retrouve son petit frère.
—« C’est le destin. Bien que Dolkhyn soit resté en prison pendant 7 ans, personne n’a rien pu prouver quant à ce dont on l’accusait. Même sans cela, depuis le début je n’ai jamais cru que mon petit frère puisse avoir une quelconque relation avec les attaques terroristes du 11 septembre 2001 à New York. Il est parti au Pakistan pour étudier dans une médressé. Pendant qu’il était sur place, il a rejoint l’Afghanistan pour y passer un stage. Ce qui lui est arrivée par la suite est bien connu. Et puis vous venez juste de le voir de vos propres yeux. Avant de quitter le Kazakhstan c’était un jeune homme vraiment très ouvert, brillant. Et maintenant, son existence a entièrement changée. Il a peur de la lumière électrique, hier nous lui avons fait prendre un bain, son cœur s’est affolé, il pouvait à peine garder ses esprits, il a pris froid aux poumons et ses reins sont aussi endommagés. Bien sûr, il est possible de prendre soin de lui avec de bonnes médecines, et de l’aider à rétablir sa santé, mais, le Dolkhyn d’avant, celui que nous connaissions qui va nous le rendre ? »

  • Le fils est de retour, mais la famille est sans nouvelles de sa mère partie à sa recherche.
Après que Dolkhyn aie disparu en Afghanistan sans laisser de trace ainsi que tous ses compagnons, sa mère Saniya a pris la route à sa recherche. D’après les membres de la famille de Dolkhyn, Saniya est partie avec son gamin de 5ans dans les bras pour le Pakistan. A cette époque personne ne pouvait soupçonner que Dolkhyn Kerimbekov, Aïtu Abykhanov, Ilxomjon Botaev et Suxbat Arupov avaient été fait prisonnier aux mains des soldats américains. Même si Dolkhyn est le dernier de ses prisonniers à avoir été libéré, on demeure encore sans aucune nouvelle de sa mère, partie il y a quelques années pour le Pakistan à la recherche de son fils.
Puisque nous n’avons pas eu l’occasion de discuter avec les citoyens Kazakstanais de Guantanamo, nous avons estimé juste de conclure cet article avec un extrait d’une interview qu’Aïtu Abykanov a donné le 31 avril 2007 au journal « Vremia ».
—« Après avoir achevé le premier cours à la médressé, j’ai été envoyé en Afghanistan pour y suivre un stage. J’ai été affecté comme aide d’un Imam dans la ville de Kabul. Je n’ai travaillé en tout et pour tout que 3 jours à cet endroit. Parce que, le 7 octobre 2001 les soldats américains et anglais lançait une attaque aérienne sur l’Afghanistan. Les bombardements les plus importants portaient sur la ville de Kabul. Alors que nous y avions survécu, et que nous avions pris la direction de la frontière pakistanaise avec un groupe d’habitants de la ville, les tribus Pachtouns locales nous ont arrêtés, puis après 5 mois vendus aux soldats américains moyennant la somme de 5 milles dollars".

Долқын отбасына оралды, ал оны іздеп шыққан анасы хабар-ошарсыз кетті (traduction du kazakh)

2 avril 2009

Le travail des enfants une atteinte portée aux jeunes générations


Dans la ville de Jalal-Abad nombreux sont les enfants, qui gagnent par leur travail des revenus supplémentaires pour eux-mêmes ainsi que pour leurs familles, le nombre de ces enfants n’est ni connu avec exactitude, ni l’objet d’estimation satisfaisante. Leurs parents ou proche famille ignorent qu’en même temps que le travail de ces enfants leur permet de résoudre leurs difficultés matérielles, il cause à ses enfants une violation de leurs droits fondamentaux ainsi que de graves problèmes de santé.


UNE ENFANCE PRIVEES DE JEUX
Marat qui a 11 ans ne va plus à l’école depuis un an et demie, il travaille comme balayeur chez un coiffeur pour homme, au centre de Jalal-Abad. Le salaire que touche Marat pour un travail quotidien de 9 à 10 heures, se résume aux 50 soms par jour que lui payent la dizaine de patrons coiffeurs chez lesquels il est employé. L’essentiel de son travail consiste à balayer et nettoyer les cheveux tombés au sol, ainsi qu’à faire chauffer l’eau pour laver les cheveux des clients. De la même manière, il effectue également toute sorte de menues travaux que lui confient les patrons coiffeurs (aller chercher des cigarettes etc.) Les raisons pour lesquelles, Marat doit travailler pour gagner cet argent, tiennent à ce qu’il est issu d’une famille nombreuse, et à ce que ses père et mère ne travaillent nulle part.
« A l’époque où je restais à la maison à ne rien faire, nous souffrions vraiment du manque de vêtement et de la faim. Maintenant je ramène de la nourriture à la maison, et mon père m’achète des vêtements comme ceux de mes amis. La seule chose qui ne me plaît pas, c’est que je suis trop fatigué, et d’avoir parfois aussi mal au dos. Je regrette aussi de ne pas pouvoir aller à l’école, et jouer au football avec les autres », - nous dit Marat lors de la discussion.
D’après le responsable des services municipaux de l’éducation, Tchyrmach Dooronov, il n’y aurait dans la ville de Jalal-Abad qu’environ six enfants en âge d’aller à l’école qui travaillent. « Au début de l’année scolaire, il y avait 21 enfants dans cette situation. Grâce aux efforts des professeurs, 15 d’entre eux sont retournés à l’école. A présent, il y a six enfants en âge d’aller à l’école qui gagnent des sous en travaillant au bazar et dans d’autres endroits »,- explique T.Dooronov.
Cependant, d’après du directeur régional du « fond pour l’enfance » K.Sarynbaïeva, le nombre d’enfants travailleurs n’est pas de 6, mais serait plusieurs fois supérieur à ce nombre. En effet, on peut y ajouter un certain nombre d’enfants qui travaillent en dehors des heures d’école. « Il est possible que les responsables des services de l’éducation, pour ne pas être mis en cause, minimisent volontairement le nombre d’enfants qui travaillent. Et maintenant combien d’enfants passent à travers les contrôles des services d’éducation, et continuent à travailler sans même savoir ce qu’est l’école ? »,- nous explique K.Sarynbaïeva.

« LE SAVOIR NE VAUT PLUS RIEN »
La majorité des enfants qui travaillent à Jalal-Abad ont entre 9 et 16 ans, et s’emploient pour l’essentiel comme vendeurs, balayeurs et porteurs sur les bazars. Leurs salaires mensuels couvrent des sommes allant de 700 soms à 1300 soms. Il est notoire que la majeur partie des enfants qui travaillent, le font en raison de difficultés d’ordre social, et sous la pression de leurs parents.
Les parents de ces enfants s’opposent à ce qu’ils aillent à l’école. Actuellement, la manière de voire très répandue selon laquelle avoir de l’argent et bien savoir travailler peut permettre non seulement d’acheter un diplôme mais également d’obtenir un emploie, semble inciter les parents à faire travailler leurs enfants.
Dans le cas de Salima Bozbalaeva, habitante de Jalal-Abad, ce n’est pas un mais ses deux enfants qui vont gagner de l’argent en vendant de la nourriture sur le bazar. Ces enfants vont de temps en temps à l’école, et n’ayant jamais redoublé étudient pour l’un en neuvième, pour l’autre en huitième classe.
« A notre époque, le savoir ne vaut plus rien. Il suffit d’obtenir de justesse une attestation de l’école, pour avec de l’argent pouvoir terminer l’enseignement supérieur. Il n’y a rien de bon à gagné dans le fait de passer onze ans de sa vie à se trimbaler des livres et cahiers. Aujourd’hui, si tu as l’argent, tu trouves facilement un bon travail. C’est pour ça, que j’apprends mes enfants depuis tout petit à savoir trouver l’argent »,- explique Salima.
Cependant ce n’est pas l’opinion de tous les parents dont les enfants travaillent. P.K. habitant de la rue Nagornaya, qui n’a pas souhaité donner son nom, raconte que faute de pouvoir faire autrement, il a dû envoyer son fils travailler comme porteur sur le bazar.
« A cause d’une santé trop fragile, il est devenu trop difficile de mener une existence convenable avec l’argent que gagne ma femme. Alors quelle autre issue, sinon prendre l’argent que mon fils peut gagner sur le bazar ? Pour sûr, j’aimerais autant le voir aller à l’école avec ses amis. Mais la vie nous laisse t’elle le choix ? »

LES ENFANTS AUSSI ONT DES DROITS
Les enfants au travail sont aussi très vite confrontés au problème du paiement de leur salaire par leurs chefs. Autrement dit, les défauts de paiement en temps voulu, ou les cas où l’employeur paye moins que la somme convenue.
D’après ce qu’en dit K.C., qui embauchent des jeunes enfants pour transporter les marchandises sur le bazar des matériaux de construction, l’essentiel pour les enfants ne devrait pas être l’argent. « Il vaut mieux qu’ils se réjouissent de ce qu’ils ont pu apprendre, que de quelques sous gagnés »,- explique K.C.
Nurbek Kacymbekov, juriste au centre d’aide sociale, explique que conformément au code du travail de la République du Kyrghyzstan, l’employeur est tenu d’établir un contrat de travail dés l’entrée en fonction d’une personne de plus de 14 ans. Malheureusement, à Jalal-Abad les enfants qui travaillent n’ont en aucune façon accès à des informations concernant les contrats de travail.
« Avant de mettre au travail des enfants non encore en âge, l’employeur doit aussi impérativement obtenir une lettre établissant l’accord de ses parents. Dans le cas d’un orphelin, il faut une autorisation écrite de travail délivrée par les services locaux de protection. Si l’on s’en tient à cela, personne n’a le droit d’employer un enfant non pubère dans un travail néfaste à la santé »,- explique Nurbek Kacymbekov.
Si nous nous en tenons à la parole de ce juriste, aucun de ceux qui à Jalal-Abad emploient des enfants ne suivent ces prescriptions, au contraire la majorité des employeurs se contentent au contraire d’un accord non-écrit. Or, en vérité il n’y a pas en ville le moindre organisme étatique ou même non-gouvernemental, pour offrir aux parents les clefs d’une compréhension des problèmes liés au travail des enfants.
« Ce n’est pas seulement s’agissant de Jalal-Abad, mais pour l’ensemble de la république que nous manquons de mesures effectives au traitement de ce problème. De plus, l’absence de réglementation concernant le travail volontaire des enfants, participe en soit à la création de toute sorte de problèmes afférant à cette question »,- ajoute Nurbek Kacymbekov.
Enfin, on considère dans le cas des enfants travaillant sur les bazars, contrairement à ceux qui employés par un entrepreneur, que ceux-ci travaillent de leur propre grés. On peut dire qu’il s’agit d’enfants « travailleurs indépendants ». Ces enfants ne sont en contrat travail avec personne, cependant il est de la responsabilité de leurs parents, et de leurs proches de veiller à leur santé.

LA SANTE EST MISE AU SECOND PLAN…
La majorité des parents semblent ignorer, que si travailler dés l’enfance permet d’apprendre très tôt à gagner son argent, cela peut s’avérer également très mauvais pour la santé de ces enfants. Il est médicalement connu que l’organisme d’un enfant continue de se développer, jusqu’arriver entre l’âge de 12 à 18 ans. Si l’enfant travaille beaucoup durant cette période, peuvent apparaître des problèmes de croissance ou de retard de développement des organes ainsi que les premiers symptômes de nombreuses maladies.
Abiba Narymbetova, docteur à la clinique du village de Kirov à Nooken, explique que les personnes qui ont commencé à travailler dés l’enfance développent fréquemment à l’âge adulte (entre 27 et 35 ans) nombreuses maladies tant au niveau des reins, du dos, des jambes, que de la tête. Cela, il est particulièrement important que les parents le gardent bien à l’esprit.
Egen baïke, âgé de 43 ans et qui travaille comme porteur sur le bazar de Jalal-Abad, témoigne également des dégâts que peuvent occasionner à la santé le travail des enfants.
« Depuis mes 8 ans, j’ai effectué toute sorte de travaux pour gagner quelques sous. En résultat d’avoir travaillé dans le froid, ma santé s’est dégradée, et après avoir dépassé 34 ans j’ai commencé à souffrir des reins. Depuis deux ans maintenant, je suis en prise à des maux de tête. Je me suis fait examiner à l’hôpital, ils disent que cela n’est que la conséquence d’avoir travaillé depuis l’enfance »,- raconte Egen baïke.
Le travailler de manière trop précoce peut causer non seulement des problèmes rénaux ainsi que des maux de tête, mais aussi des maladies affectant le système nerveux.
« Tous les enfants aiment l’argent. Lorsqu’il ne leur reste plus un sous en poche, ils cherchent alors à travailler encore plus. Ce désir de toujours gagner plus est de nature à faire obstacle à la récupération du système nerveux. En conséquence, lorsque ces personnes grandissent, elles deviennent sujettes à des accès de colère imprévisibles. Par ailleurs le fait, quand on est petit de faire la vaisselle, de travailler dans un endroit froid peut faire craindre l’impossibilité d’avoir des enfants pour les personnes concernées»,- explique A.Narymbetova.
C’est ainsi que commencer de travailler trop précocement est de nature à imprimer une trace durable à la psychologie de l’enfant. D’après Gülnara Jassolova, psychologue au centre médico-social « Altynaï », l’intérêt pour les études s’éteint vite chez les enfants, qui ont intériorisé un tel rapport à l’argent.
« En effet, l’enfant qui sait ce que peut lui offrir l’argent, ne peut plus s’empêcher de courir après. Les enfants pris très tôt au goût de l’argent, se désintéressent pour une vie sans gain immédiat, et en perdent toute inhibition envers la criminalité. Par là, l’idée que « chacun devrait travailler depuis l’enfance » s’imprime dans la psychologie de ces enfants, et plus tard il est possible qu’ils forcent également leurs propres enfants à travailler très jeune »,- explique G.Jassolova.
Si l’on s’appuie également sur un communiqué des autorités en charge du service militaire, le travail trop précoce des enfants est à l’origine de toute sorte de problèmes quand vient le moment pour eux de faire leur service. Abdurassul Düechebaev, chef du comité militaire de la ville de Jalal-Abad, considère que le cas de jeunes en âge de faire leur service, présentant un poids insuffisant en rapport à leur taille, est résultent souvent d’un travail effectué en d’un âge trop précoce.
« Actuellement, sur 10 enfants 9 ne conviennent pas pour partir faire leur service à l’armée. Si on continue à ce rythme là, à qui pourra-t-on confier l’avenir du Kyrghyzstan ? Ainsi, les parents, qui mettent leurs enfants au travail, feraient bien mieux de réfléchir à leur santé, et de se soucier un peu de leur avenir. »,- dit A.Duïchebaev.

Comme l’indique le juriste Nurbek Kacymbekov, si aucune mesure n’est prise par les autorités pour prévenir le recours au travail des enfants, les problèmes liés à cette question ne feront qu’aggraver, et le danger que l’on fait peser sur la santé des enfants risque de compromettre grandement l’avenir des jeunes générations.


Vendredi, 27 Mars 2009, Sanjar Eraliev, Jalal-Abad, pour le journal "Kyrghyzstan Zaman" "Баланы иштетүү - тукум улоого зыян" (traduction du kyrghyz)

Le fils intelligent (Акылдуу бала)


Il y a fort longtemps vivait un voleur dont la renommé était immense. Celui-ci n’avait qu’un fils, et comme il était très fier de sa profession, il priait régulièrement dieu de voir le jour, où par son exemple son fils deviendrait à son tour voleur. Un jour, alors son fils avait déjà bien grandi, le voleur l’appela à ses côtés pour lui tenir conseil.

— « Mon enfant, si tu te dis mon fils, écoute ce que je vais te dire. Hériter du métier de son père, tel est le devoir d’un fils. Ainsi, c’est à toi maintenant d’embrasser la profession de voleur. Saches qu’il n’existe pas de meilleur métier ! »
Son fils lui répondit alors,
— « Père, si vous souhaitez que je devienne quelqu’un, alors ne m’apprenez pas les tours de votre métier de voleur. Faîtes plutôt en sorte que je prenne un métier honnête. »
A ces paroles, le voleur ne pouvant retenir sa colère se fâcha :
— « Qu’est-ce à dire que tu ne suives pas mon chemin ? De quelle impertinence te défies-tu de ton père? Parfait, je ne le répèterai pas deux fois ! Cette nuit, tu iras voler ce bœuf à la robe acajou qui appartient à Joochbaï du village d’en bas. Cet animal a engraissé à un point que c’en est un miracle, et je ne trouverai pas le repos avant d’avoir mis la main dessus. Si tu ne ramène pas cette animal ici, ne t’avise plus de m’appeler père, et disparais de ma vue. »
Le fils comprenant que son père ne plierait pas à la raison, fit mine d’accepter sortit et alla trouver Joochbaï, auquel il acheta ce fameux bœuf acajou au prix des semences d’automne. Or, son père n’en savait rien et se réjouissait à l’idée, que son fils soit devenu voleur pour de bon. La nuit venue le père et le fils égorgèrent le bœuf, arrachèrent sa peau, tranchèrent sa viande pour la suspendre. Le jour suivant, plaçant la marmite sur le feu, ils y firent cuir la viande à gros bouillon, le fils s’adressa alors à son père en ces termes :
— « Père, avant que de manger cette viande, montons chacun notre tour sur la balance. Quand la viande de ce bœuf sera terminée, nous pourrons savoir lequel de nous deux a pris le plus de poids. Acceptez-vous ? »
Le père, sans trop comprendre de quoi il retournait, accepta et chacun son tour ils montèrent sur la balance. Un mois ne fut pas passé, qu’ils vinrent à bout des derniers de la viande de ce dit bœuf. Tous deux montèrent de nouveau sur la balance. Or, ne voilà t’il pas que notre voleur de père a maigri de plusieurs kilos, tandis que son fils a lui grossi d’autant. Le père fort étonné se retourna vers son fils.
— « Père, il n’y a rien d’étonnant à cela, pendant que vous mangiez votre part, la crainte que ce vol ne soit découvert ne vous quittais pas, tout en mangeant vous vous efforciez de n’être vu de personne. Quant à moi, ce bœuf acajou, en vérité je l’ai payé pour son juste prix, ainsi je ne partageai nullement vos craintes, et j’ai mangé à ma faim, sans me faire de soucis. Vous n’avez pu manger à votre faim. Ainsi, retenez bien, que seul un repas gagné au travail fait engraisser son homme. »
— « Mon fils, moi qui ai toujours été voleur, je n’y avais jamais pensé. Désormais, comment ne verrai-je pas de moi-même, que le vol est une mauvaise chose ? Ta décision de ne pas aller par ce chemin, pour faire le choix d’un travail honnête était donc juste. J’ai enfin compris ! » — dit son père, qui dit-on abandonna aussi le brigandage.
(Кыргыз эл жомоктору)