17 septembre 2009

A deux pas du lac atomique le village de Sarjal, privé d’eau potable, se meurt


Dans une région du Kazakhstan, il reste comme témoignage des projets pour une « énergie atomique pacifique » conduit à l’époque soviétique un lac atomique. Les habitants du village de Sarjal, qui vivent à proximité du lac, affirme quant à eux n’avoir aucun accès à une eau potable propre.

  • UNE RADIOACTIVITE 50 FOIS SUPERIEURE A LA NORMALE
Si vous ouvrez une encyclopédie de l’époque soviétique, vous pourrez y lire, que parmi les objectifs poursuivis par les scientifiques en charge des programmes nucléaires, figurait la constitution de réservoirs d’eau à destination de projets d’irrigation pour l’agriculture dans les zones particulièrement arides. Suite aux très nombreux essais d’armes nucléaires dans la région de Semeï, la terre reste marquée de profondes cicatrices, gouffres béants, montagnes écroulées et d’un lac atomique.
D’après les informations rendues disponibles par l’institut de prévention des risques nucléaires et de l’écologie, le 15 janvier 1965 les autorités firent procéder à une explosion souterraine d’une amplitude de 140 kilotonnes. Suite à cette expérimentation se forma un gouffre d’une profondeur excédant 100 mètres et d’une périphérie de 400 mètres. L’amplitude de cette explosion est de 9 fois supérieure à celle de la bombe lâchée en 1945 sur Hiroshima. Par ailleurs, l’explosion ayant été effectué à la confluence des rivières Shaghan et Ashysu, dés le printemps de cette année 1965, les eaux qui s’y déversaient remplir le gouffre, et le lac atomique apparut.
Les différents films réalisés par les soviétiques au sujet du polygone d’essais nucléaires de Semeï nous apprennent ceci : Des prélèvements d’eau eurent continuellement lieu sur toute la périphérie du nouveaux réservoir, et ce à différentes époques ; les résultats des tests ensuite poursuivis mettaient en exergue l’absence de risque pour la santé humaine des eaux du réservoir et la possibilité de leur utilisation pour l’irrigation et l’abreuvement du bétail.
Cependant, d’après Sergueï Loukachenko directeur de l’institut de prévention des risques nucléaires et d’écologie, les résultats de tests réalisés récemment sur une courte période ont permis de mettre en évidence l’existence de zones contaminées par les radiations. La région du lac atomique en fait bien sûr partie.
Comme il est fait figuré dans les matériaux de recherches portant sur le polygone d’essai de Semeï, que l’institut a publié en 2008 dans des revues de vulgarisation scientifique, il a pu être mis en évidence lors d’études sur les milieux aquatiques dans les environs du polygone que la rivière Shaghan étaient entièrement contaminées par les résidus des essais nucléaires.

  • LE VILLAGE DE SARJAL
Le village de Sarjal se trouve à proximité du lac atomique, la centaine d’habitant qui y demeure survit dans une très grande précarité. Pour ne pas parler du reste, le village est privé d’eau potable.
Shamil Omarkhanov habitant du village au journaliste d’Azattyk :
— « Quand on allume la télé, on nous parle sans arrêt de la nouvelle installation de conduites d’eau potable dans telle ou telle localité. Et personne n’a rien à faire de nous qui vivons sur le polygone. De savoir si c’est de l’eau que l’on boit ou bien du poison ? »
Les habitants de Sarjal estiment que les eaux du lac parviennent également à contaminer les eaux des nappes phréatiques. D’après Aïken Akimbekov, habitant du village, lorsque le vent souffle en provenance du lac, l’air est empesté au point de ne plus être respirable. Quant à l’eau du lac elle est impropre à la consommation :
— « Boire l’eau, voir même respiré l’air de ce lac est impossible. L’air puant qui nous vient du côté du lac vous fait tourner la tête. On serait d’accord si l’on nous proposait de quitter ce lieu. Que l’on puisse respirer un air pur le reste de notre vie et le passer dans la joie avec nos enfants. »
40 ans après la formation du lac, le bétail refuse toujours de boire de son eau, et les oiseaux désertent ses rivages. Les habitants du village de Sarjal considèrent que les maladies cardiaques, l’hypertension qui affectent la majorité d’entre eux ainsi que les naissances d’enfants lourdement handicapés ont pour cause les déchets radioactifs que charrie le vent qui souffle en provenance du lac. Si l’on en croie les habitants du village, les autorités kazakhes ne sont d’aucune aide aux populations qui vivent sur le territoire de l’ancien polygone d’essais soviétique.

  • LES POISSONS DU LAC
De nombreux habitants de la région de Semeï n’ont pas oublié à ce jour, les poissons que l’on amenait à la vente fraichement pêchés du lac. A l’époque personne n’aurait pensé qu’avec le poisson c’était les radiations que l’on amenait en ville.
Lidya Andreeva habitante de la ville de Semeï, a fait le récit suivant aux correspondants de radio Azattyk :
— Je connaissais un homme qui est à présent décédé, il vivait à Semeï à l’époque des essais nucléaires, et est même parti travaillé par la suite sur le site de Tchernobyl. Voilà, celui-ci avait l’habitude de plaisanté en disant : « j’ai pris des radiations pour l’équivalent d’une centaine d’années, maintenant plus rien ne me fait peur, et pour en rajouter je prends du poisson radioactif chaque matin pour mon petit déjeuner ». Malheureusement, il est mort de suite d’un cancer de la peau.
D’après ce qu’en disent les habitants du village, successivement à l’apparition du lac dans la steppe de Semeï, de nombreuses personnes non contentes d’en pêcher les poissons, venaient se baigner dans ses eaux et y abreuver leur bétail. Le lac atomique pourtant site d’expérimentation n’a jamais été gardé et ne l’ai toujours pas à ce jour.
Sergueï Loukachenko, directeur de l’institut de prévention des risques nucléaires et de l’écologie, rejette quant à lui toute allégation de risque pour la cité des populations du polygone :
— Le site du polygone ne représente absolument aucun risque pour les habitants du Kazakhstan. Oui, en effet le polygone n’est pas mis sous garde, nous ne disposons pas des finances qui nous le permettrait. Ce étant je souhaite ajouter, qu’il n’y a pas de radiations dangereuses ou bien inoffensives. Tout le problème tient à la perception que l’on se fait du niveau de dangerosité ou d’inoffensivité du phénomène — explique-t-il.

  • PAS D’ARGENT POUR LA SURVEILLANCE DU SITE
Suivant l’avis des experts, des mises en garde ont à ce jour été réalisées à propos de la nocivité du site et des risques pour la santé humaine. Mais, les habitants du village n’en ont cure. Le polygone est devenu pour eux leur principale source de revenus : en creusant le sol, ils en récupèrent les cables restés enterrés qu’ils refourguent ensuite au titre de ferraille usagée.
Janbolat Ghylmanov, vétérans de l’atome de l’URSS, explique ce qui suit au journaliste d’Azattyk dans un interview :
— Ceux qui déterrent ces cables, n’ont pas conscience que se faisaint ils ramènent à la surface les dangereuses particules nucléaires absorbées par le sol. Nous avons porté plusieurs fois des propositions quant à la surveillance de ces sites à l’attention des autorités Kazakhes. Mais, au final il se trouve que tout se résout à une question de finances.

  • SOUS LE NOM DE « DEGELENGIKUM »UNE NOUVELLE PLANTE A FAIT SON APPARITION
D’après les habitants des villages de Degueleng et Sarjal, sous l’effet des essais nucléaires souterrains menés dans la région, on a commencé a y trouvé depuis environs deux ans une nouvelle plante qui était jusqu’alors inconnue des scientifiques.
Cette herbe (dont l’on a su par la suite qu’elle n’est pas vénéneuse) est une nouvelle espèce végétale. Les villageois disent qu’elle n’a été découverte que récemment. Elle entre désormais dans la nomenclature de la flaure du Kazakhstan. En référence à la région où elle pousse, elle est connue sous le nom de « Degelengikum ».
Le site expérimental de « Degeleng » était utilisé pour des essais de moyenne et faible intensité. Comme le montre le résultat d’études et d’observations portant sur plusieurs années, les résidus nucléaires des essais de bombes continuent à se propager par l’intermédiaire de l’eau.
D’après les documents de l’institut de prévention des risques nucléaires, un phénomène de mutation des végétaux de la région est en cours. C’est spécialement le site d’expérimentation de Degeleng qui attire l’attention des experts. Les experts kazakhs explique que l’étude des animaux et végétaux de cette zone permettra de découvrir encore nombre de nouvelles données.

Radio Azattyk «Атом көлі маңындағы ауыз сусыз отырған Саржал ауылы тозып барады » (traduction du Kazakh)

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